L’exclusion et le repli sur soi ont un coût

Tribune co-signée avec Fabien Forge et Virginie Martin, et publiée dans "Libération", le 12 février 2015.

En choisissant de renouer avec la vieille rhétorique de l’assimilation que l’on pensait définitivement enterrée, en la préférant à un concept pourtant lui-même vidé de sens, « l’intégration », Nicolas Sarkozy a incarné, le 7 février 2015, à la Mutualité, le refus d’un monde qui change, inéluctablement.

La société française est porteuse de richesses précisément par le pluralisme ou plutôt les pluralismes qui la traversent. Ce n’est pas un vain mot, ce n’est pas un vœu pieu moralisateur, c’est une réalité concrète. Mais parce que certains s’obstinent à ne pas le voir, c’est autant de cohésion sociale gaspillée, et c’est aussi un coût économique considérable. Continuer à laisser penser que les immigrés, ainsi que leurs enfants et petits-enfants, français, nés et socialisés en France, sont a priori un problème participe, bien plus qu’on ne le croit, de la défiance généralisée qui nous mine. Non seulement à l’intérieur de nos frontières, mais aussi à l’international : un pays qui ne se fait pas confiance, qui ne fait pas confiance à sa population, ne suscite pas la confiance des autres.

Les travaux internationaux sur le coût que les inégalités font peser sur la croissance se multiplient. Sur les plans économique comme sociétal, les pratiques et les discours discriminatoires occasionnent une dynamique négative faite de peurs, de haine, ou a minima de préjugés et de méconnaissances, qui se traduit par le renoncement à des compétences et des intelligences. Les discriminations ne sont une bonne affaire pour personne.

 L’apartheid existe dans certains territoires, il perdure aussi dans les esprits.

Par son organisation territoriale, ses programmes rigides et son fonctionnement même, l’Ecole ségrégue et relègue une partie de ses élèves. Parce qu’il privilégie encore trop souvent l’entre-soi (types de diplôme, formation initiale, codes sociaux, origine géographique voire ethnique, sexe), le monde du travail, notamment dans ses postes d’encadrement, se prive de talents, de savoir-faire, de créativité, de capitaux culturels. En résultent l’exclusion sociale, le repli sur soi, voire la marginalisation. Et cela pèse aussi sur la productivité : les salariés surqualifiés ne sont pas encouragés à fournir des efforts qui ne sont jamais récompensés puisque le plafond de verre perdure pour les femmes comme pour les personnes « d’origine immigrée »(…).

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