Interviewée par « La Montagne » sur « Le nouveau visage des droites américaines »


« Les Etats-Unis, un miroir pour la France », Interview realisée par Dragan Pérovic pour « La Montagne » (édition de Corrèze, Tulle).

Extraits :

Dans votre livre vous décryptez les divisions actuelles, nombreuses et complexes, des droites américaines que le Parti républicain peine à canaliser. La radicalisation de certains courants est de plus en plus forte notamment face à un ennemi fédérateur, Barack Obama ? Pourquoi concentre-t-il autant de haine ?

Obama a canalisé les critiques des conservateurs, parce qu’il représente tout ce qu’ils détestent. Il est issu des grandes universités de la Côté Est. On le voit comme quelqu’un d’élitiste, comme un Démocrate éloigné du peuple, ce qu’il n’est pas en réalité. De plus, il est noir et c’est un facteur qu’il ne faut pas oublier, parce que, pour beaucoup, il représente cette « colorisation » en marche de la société américaine, l’image d’une Amérique qui est en train d’échapper à l’Américain blanc, moyen, venu d’Europe. Obama symbolise cette transformation démographique et culturelle des États-Unis. Pour certains conservateurs, c’est absolument insupportable, alors que c’est déjà une réalité.

Les droites américaines exigent plus de libertés, économiques, des moeurs, religieuses et étalent leurs obsessions fiscales, morales et raciales. Elles tentent de mobiliser en jouant sur la peur des menaces extérieures comme Daech, Ebola, les immigrés, l’Iran, mais aussi sur les menaces intérieures…

Là, on est sur un point de questionnement identitaire profond, qui est presque le même en France. « Qui sommes-nous dans un monde globalisé, où les influences culturelles circulent, où la démographie change et où l’on n’a plus le même rôle au niveau mondial ? » Ce qui m’a fascinée, ce sont justement ces contradictions des droites américaines par rapport à l’idée du libéralisme. Leurs membres sont ultralibéraux sur l’économie, mais très conservateurs sur les droits des femmes et des homosexuels, sur les questions raciales. Ils sont très crispés sur une sorte de passé idéalisé qui n’existe plus. Finalement, je trouve que la droite américaine ressemble beaucoup à la droite française.

Selon vous, les États-Unis constituent un miroir pour la France, où la société civile, comme une partie des élites sont profondément clivées sur certaines thématiques. Où faut-il chercher les raisons de cette convergence ?

Je crois que les États-Unis sont un pays qu’on adore détester, alors qu’il nous ressemble beaucoup. La démocratie y est née à peu près au même moment que chez nous. Au XVIII e siècle, il y a eu une concurrence entre les deux pays sur celui qui avait le meilleur modèle démocratique. À part ça, ce sont deux pays occidentaux, deux pays d’immigration qui se sont construits sur un métissage, qu’on le veuille ou non. Aujourd’hui, ils sont traversés par les mêmes enjeux de puissance mondiale. On s’y pose les mêmes questions par rapport au capitalisme, à la liberté et à la démocratie. Nous, nous avons un passé colonial, les États-Unis ont un passé esclavagiste, ce qui nous rapproche aussi dans la manière de traiter nos minorités.

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