Interview pour « Ouest France » : « L’égalité fille-garçon dès la cour de récréation »
Publié le 16 janvier 2014
Les stéréotypes ont la vie dure. Un rapport préconise de lutter, dès l’enfance, contre les obstacles à la mixité, à l’école, à la maison… La société et l’entreprise en sortiront gagnantes. ENTRETIEN avec Marie-Cécile Naves, sociologue, co-auteure du rapport du Commissariat général à la stratégie et à la prospective.
Selon votre rapport, le chemin de la mixité est toujours pavé d’idées reçues ?
Depuis cinquante ans, les lois ont fait avancer l’égalité des sexes. Mais les stéréotypes sont toujours bien ancrés dans l’inconscient collectif. Considérer qu’il revient aux femmes de s’occuper des enfants et des tâches domestiques amène, aujourd’hui encore, des freins dans les choix professionnels, les gestions de carrière.En France, près de 80 % des métiers ne sont pas mixtes ; la proportion d’hommes ou de femmes y est inférieure à 40 %. Un blocage qui se retourne contre les hommes, qui accèdent difficilement à certains emplois jugés trop féminins. À l’horizon 2020, des emplois seront vacants en raison de ces stéréotypes, dans l’artisanat, la boucherie, le secteur de l’aide à la personne.
Que faire si la loi ne parvient pas à gommer ces vieux schémas ?
Agir dès l’enfance. Sans tomber dans la négation caricaturale des différences sexuelles, il faut ouvrir largement le champ des possibles : permettre, par exemple, à une fille de jouer au football, à un garçon de faire de la danse sans qu’il soit soupçonné d’homosexualité. Nous préconisons de conditionner les subventions aux clubs sportifs à leurs efforts vers plus de mixité. Dès l’école, on peut contrer de vieux adages – « Les filles ne sont pas scientifiques et les garçons ne veulent pas lire » – en utilisant les nouvelles technologies et des programmes ludiques sur tablettes. Aujourd’hui, dans les illustrations des manuels de mathématiques, on compte cinq personnages masculins pour un féminin.