Primaires démocrates : après l’Iowa
Publié le 09 février 2020Interview accordée à la grande reporter Karen Lajon pour le « Journal du dimanche » (JDD), édition papier du 9 février 2020, sur le début de campagne chaotique des démocrates.
À deux jours de la primaire du New Hampshire, les candidats démocrates doivent enjamber la séquence négative.
Rien n’est joué chez les démocrates. Et ce n’est pas le huitième débat entre eux vendredi soir à la télévision qui aura permis d’y voir plus clair. Certes, Pete Buttigieg et Bernie Sanders sont au coude-à-coude mais Joe Biden est-il réellement proche de la sortie?
« ll est trop tôt pour dire qu’il a perdu, assure Marie-Cécile Naves, chercheuse à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). Il reste populaire auprès d’un électorat démocrate qui sociologiquement le soutient largement, comme la communauté noire ou les Latinos. La difficulté de Biden reste d’apparaître comme un centriste, pragmatique et porteur d’unité nationale plus crédible que chez Buttigieg. »
L’ex-vice-président Biden a lui-même plaisanté sur son très mauvais score au caucus de l’Iowa et sur celui qu’il anticipe, tout aussi faible, mardi dans le New Hampshire où Bernie Sanders est crédité de 25% d’intentions de vote. L’avenir de Joe Biden devrait se jouer en partie aux primaires de la Caroline du Sud et du Nevada où la configuration démographique et sociologique lui est plus favorable.
Le milliardaire Bloomberg entrera en scène le 3 mars
« Ce n’est pas pour rien que Joe Biden a attaqué Buttigieg lors du débat, alors que son rapport avec les minorités reste son point faible », indique Laurence Nardon, chercheuse à l’Institut français des relations internationales (Ifri).
Le Super Tuesday du 3 mars où 16 États voteront en même temps marquera l’entrée en scène du candidat Michael Bloomberg, qui a déjà investi 200 millions de dollars de sa fortune dans sa campagne. « Les résultats permettront de voir si les caciques du parti vont se livrer à quelques ’billards à trois bandes’ dans la désignation finale du vainqueur », ajoute la chercheuse.
Une erreur stratégique, selon Marie-Cécile Naves : « Si les caciques cèdent à la panique et rejouent ce qui s’est passé en 2016 avec Bernie Sanders et Hillary Clinton, cela ne fera qu’augmenter la défiance grandissante des gens vis-à-vis des politiques. » Le rôle des super-délégués (15% des délégués), qui avaient désigné Hillary Clinton face à Sanders, a d’ailleurs été réduit. Ils ne voteront pas au premier tour du scrutin lors de la convention. « Mais ce n’est pas suffisant, précise Laurence Nardon. Les démocrates sont dans une séquence négative. Après le caucus de l’Iowa et l’impeachment, la machine à perdre s’est mise en route. Il va fallloir beaucoup pour l’enrayer. »