Trump et les médias
Publié le 21 août 2024Le 19 juillet 2024, j’étais invitée dans l’émission « Arrêt sur images », pour parler de la couverture médiatique de Donald Trump. Avec Sonia Dridi et Alexis Pichard. Une émission présentée par Nassira El Moaddem.
L’événement, survenu à des milliers de kilomètres, a fait basculer les chaînes d’information françaises en édition spéciale, y compris très tard dans la nuit. L’ex-président des États-Unis touché par balles à l’oreille après une tentative d’assassinat : et voilà les caméras des médias français braquées sur l’Amérique, alors même que le feuilleton politique et parlementaire hexagonal bat son plein. Celui qui était décrié pour la violence de ses mots et de sa politique, celui dont les médias décrivent depuis des années les frasques judiciaires, est désormais l’objet de toutes les attentions bienveillantes. Après avoir échappé à la mort, Donald Trump se serait désormais assagi, prônant l’unité, et est décrit comme un survivant, voire un héros.
Les médias sont-ils devenus amnésiques ? Qu’est-ce qui se cache derrière la photo de Trump, oreille ensanglantée, brandissant son poing face à la foule de partisans ? L’émotion face au drame subi par Trump, mais aussi la communication et la propagande, ont-elles pris le pas sur l’information ? Pour y répondre, nous recevons trois spécialistes des Etats-Unis : la politologue Marie-Cécile Naves, l’historien Alexis Pichard et la journaliste Sonia Dridi.
« L’absence de mouvement de foule est révélatrice de la relation de Trump avec ses partisans »
La photo d’Evan Vucci, le photographe américain qui a immortalisé Donald Trump juste après la tentative d’assassinat qui l’a ciblé, a fait le tour du monde. Bien plus que la vidéo du meeting. «
I
l y a quand même quelque chose de fascinant dans cette vidéo qui souligne la dévotion des partisans de Trump à leur gourou, analyse Sonia Dridi. En général, dans ce genre de situation, il y a des mouvements de panique dans la foule, et là, au lieu de partir en courant et de se piétiner, ils regardent si leur candidat va bien. L’absence de mouvement de foule est vraiment révélatrice de la relation qu’entretient Donald Trump avec ses partisans. »
La tentative d’assassinat envers Donald Trump a complètement occulté les thèmes de campagne du camp de l’ancien président des États-Unis. Lors de la convention à Milwaukee, les partisans du candidat républicain à l’élection présidentielle américaine ont brandi des pancartes « Mass deportation now » –
appelant donc à l’expulsion immédiate des exilé·es installé·es aux États-Unis. «
La présence de beaucoup de femmes blanches au premier plan qui brandissent ces pancartes n’est pas fortuite, observe Marie-Cécile Naves. Dans le mot d’ordre «Make America Safe Again» («Rendons l’Amérique sûre à nouveau»), le mot «safe», c’est contre les immigrés qui selon la rhétorique trumpiste «empoisonnent le sang du pays», ce sont «les violeurs et les voleurs». » Elle rappelle que cette rhétorique existait déjà en 2016. « Mais «Make America Safe Again», ce n’est pas une Amérique qui est «safe» pour les femmes qui veulent accéder à la santé gynécologique, à la contraception oui qui meurent car elles ne trouvent pas les moyens d’avorter. »