Voile intégral : un site d’information gouvernemental
Publié le 23 mars 2011Un site internet, intitulé « La République se vit à visage découvert », a été mis en place par le gouvernement français, qui rappelle par ce biais les principes, fondements et modalités de la loi du 11 octobre 2010, laquelle entre en vigueur le 11 avril prochain. Il sera alors interdit de se dissimuler le visage dans l’espace public.
Sont ainsi « solennellement » réaffirmées « les valeurs de la République et les exigences du vivre-ensemble » et de « dignité », l’idée d’un « destin partagé », et refusés « l’infériorité », « l’exclusion et le rejet, quels qu’en soient les prétextes ou les modalités ».
Sont également rédigées des réponses aux questions que pourrait se poser le grand public, et téléchargeables une affichette, un dépliant et la circulaire du 2 mars 2011 – envoyée par le Premier Ministre en particulier aux préfets et ministères – relative à la mise en œuvre de la loi.
On apprend en outre que celle-ci « concerne toute personne, quel que soit son sexe, son âge ou sa nationalité », étant entendu qu’il s’agit bien sûr des femmes, et qu’« elle s’applique aux résidents comme aux touristes ».
Plus concrètement, « sont notamment interdits, sans prétendre à l’exhaustivité, le port de cagoules, de voiles intégraux (burqa, niqab…), de masques ou de tout autre accessoire ou vêtement ayant pour effet, pris isolément ou associés avec d’autres, de dissimuler le visage ». Sont sujettes à exception : les tenues « prescrites » comme le casque pour les motocyclistes, les masques portés pour raisons de santé ou professionnelles. Si, par exemple, vous croisez un « liquidateur » de centrale nucléaire dans la rue, ne le dénoncez pas parce qu’il porte une protection pour éviter les contaminations !
Lors de fêtes ou de manifestations sportives ou religieuses bien définies (comme les processions), il sera également permis de se cacher le visage pour les besoins de l’événement.
Il nous est ensuite fourni plusieurs définitions bien commodes, celles :
– D’espace public : « voies publiques ainsi que (…) lieux ouverts au public ou affectés à un service public » ;
– De voies publiques : « espaces urbains ou ruraux de circulation (rues, routes, places, trottoirs …) ».
De surcroît, exceptés « ceux affectés aux transports en commun, les véhicules qui empruntent les voies publiques sont considérés comme des lieux privés ». Comprendre : on peut porter une burqa dans une voiture, sauf si la conduite du véhicule « [présente un] risque pour la sécurité publique ».
– De lieux ouverts au public : leur « accès est libre (plages, jardins publics, promenades publiques…) » ou « possible, même sous condition, dans la mesure où toute personne qui le souhaite peut remplir cette condition (paiement d’une place de cinéma ou de théâtre par exemple). Les commerces (cafés, restaurants, magasins), les établissements bancaires, les gares, les aéroports et les différents modes de transport en commun » en font également partie.
– De lieux affectés à un service public (attention, ce n’est pas la même chose) : « ensemble des institutions, juridictions et administrations publiques, ainsi que des organismes chargés d’une mission de service public » (y compris CAF, CNAM, Pôle Emploi, musées, bibliothèques, établissements scolaires, bureaux de poste, hôpitaux).
Enfin, les lieux de culte sont concernés par la loi dans la mesure où ils sont ouverts au public.
Seules la police et la gendarmerie sont habilitées à constater et réprimer la dissimulation proscrite du visage.
Arrêtons-nous pour finir sur l’affiche qui accompagne ces informations. Elle met en scène une Marianne coiffée d’un bonnet phrygien (ici symbole contraire au voile), à la poitrine couverte (pour une fois), et au visage impassible quoique non départi d’une certaine fierté : elle regarde droit devant elle. Ses cheveux sont projetés en arrière (peut-être parce qu’elle avance, décidée, vers un avenir qu’elle aura, seule, choisi). Une phrase de la loi est citée en exergue, avec des guillemets (donnant dès lors l’impression que c’est Marianne qui la prononce). Le code couleur est bleu-blanc-rouge (surtout bleu).
Qu’on se le dise : l’allégorie de la République française ne porte pas de burqa parce qu’elle est une femme libre ! Et d’ailleurs, elle parle ! Ita missa est.