Article et interview pour « Womenology » sur le rapport « Lutter contre les stéréotypes filles-garçons »

Womenology, le laboratoire de recherche consacré au marketing et à la communication à destination des femmes créé par aufeminin.com, a publié un article sur le rapport « Lutter contre les stéréotypes filles-garçons ».

En France, les inégalités de genre perdurent. A titre d’exemple, les femmes représentent seulement 20% des membres des conseils d’administration du CAC 40. De leur côté, les hommes occupent seulement 1,3 à 1,5% des emplois du secteur de l’accueil et de l’éducation des jeunes enfants. Pourtant, depuis les années 1950, de nombreuses lois ont fait avancé l’égalité hommes/femmes. En 1944, le droit de vote et d’éligibilité des femmes voyait le jour. Puis, le droit de gérer ses biens propres et de travailler sans l’autorisation de l’époux fut légiféré en 1965. Suivront le principe d’égalité salariale (1972 et 2006), et enfin le principe d’égalité professionnelle (1983 et 2001).

Pour comprendre l’origine des inégalités, Najat Vallaud-Belkacem, Ministre des Droits des femmes, a demandé au Commissariat général à la stratégie et à la prospective de réfléchir à une manière transversale d’aborder les stéréotypes de genre. Coordonné par Marie-Cécile Naves, sociologue et politiste et Vanessa Wisnia-Weill, psychologue et psychanalyste, le dossier final, a été rendu au gouvernement le 15 janvier 2014 et annonce 30 propositions visant à faire évoluer les pratiques et mentalités. 

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Womenology nous a également consacré une interview, intitulée « Lutter contre les stéréotypes sexistes, c’est une question de justice sociale » : 

D’après vous, quels sont les chiffres les plus étonnants relevés par le rapport que vous avez remis au gouvernement sur les stéréotypes de genre ?

Certains chiffres, comme les écarts de salaires ou le temps partiel subi sont connus, mais nous mettons au jour des éléments qui méritent d’être rappelés. Par exemple, seuls 17% des métiers (soit 16% des emplois) sont mixtes (au moins 40% de chaque sexe), la palette de métiers comportant beaucoup de femmes étant plus réduite que celle comportant beaucoup d’hommes. De plus, à l’issue de la classe de troisième, plus de 20% des adolescents évoluent dans des classes comportant moins de 30% d’individus de l’autre sexe – essentiellement ceux qui rejoignent l’enseignement professionnel et technologique- et, si l’on ajoute que les loisirs, eux-mêmes, sont peu mixtes, cela signifie qu’un entre-soi sexué se met en place très tôt dans la vie.

En matière de sport, à l’adolescence, l’écart de pratique entre filles est garçons atteint 30% dans les classes populaires, à l’avantage des garçons. C’est préoccupant sur le plan de l’éducation et de la santé. Un autre chiffre dramatique est que, toujours en raison des stéréotypes, parmi les personnes ayant subi des violences sexuelles dans leurs enfance, seuls 8% des hommes contre 20% des femmes ont été repérés par l’Aide sociale à l’enfance. Au niveau scolaire, l’intériorisation d’une infériorité par les filles dans les matières scientifiques conduit à une auto-censure : quand elles se jugent très bonnes en mathématiques, 6 filles sur 10 vont en section S, contre 8 garçons sur 10.

Si la féminisation des secteurs qualifiés, comme les écoles d’ingénieurs, a progressé, d’autres voies restent très genrées (BTP, petite enfance), comment l’expliquer ?

Effectivement il faut souligner que nombre de métiers qualifiés, et les orientations y conduisant, ont progressé en mixité. L’exemple des ingénieurs est paradigmatique : 3% de filles dans ces filières dans les années 80 contre 34% maintenant (nouvelles cohortes). En revanche, les lignes n’ont pas bougé sur les métiers moins qualifiés, ni sur les métiers d’éducation et de soin. La prise en charge des petits enfants est une « affaire de femmes ». C’est très ancré dans les mentalités : le taux de masculinisation se situe entre 1,3 et 1,5% dans l’accueil et l’éducation des jeunes enfants. Les métiers du soin et d’attention à l’autre, autrefois gratuits, ont toujours été considérés comme « naturellement féminins ». C’est un stéréotype très fort qui pénalise tout le monde.

Dans la famille, les pères participent peu aux tâches domestiques et à la préparation à la naissance ; seuls 12% des pères prolongent leur absence professionnelle au-delà du congé de paternité, contre 55% des femmes. De plus, les entreprises semblent plus réticentes à accepter une conciliation vie familiale/vie professionnelle dans le cas des hommes, par rapport aux femmes. Du côté des métiers très masculinisés, les stéréotypes sont également forts : l’idée que travailler dans le BTP, par exemple, nécessite d’avoir une grande force physique est véhiculée dès le lycée professionnel – alors que cela n’est pas vrai du « second œuvre » et que d’autres métiers très féminisés comme aide-soignante ou caissière sont souvent épuisants physiquement. Dès lors, à cause de la « prise d’exemple », les jeunes grandiront avec l’idée qu’il y a des « métiers d’hommes » et des « métiers de femmes » très clivés : cela limite trop précocément leurs opportunités professionnelles et les conditionne dans leurs futurs rôles sociaux et les inégalités qui les accompagnent.

De plus, il y a un enjeu d’insertion professionnelle à la clé : sur une série de secteurs porteurs peu mixtes, on peut constater un lien entre la difficulté ressentie par les employeurs à recruter et la trop faible mixité du secteur.

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