Le 15 décembre 2020, j’étais l’invitée d’Olivia Gesbert dans « La Grande Table » sur France Culture, afin d’analyser l’actualité nationale et internationale avec le prisme de « La démocratie féministe ».
Quel renouveau démocratique global les revendications féministes portent-elles ? On en parle avec Marie-Cécile Naves, docteure en science politique de l’université Paris-Dauphine et directrice de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).
La présidence Joe Biden et ses changements symboliques, à commencer par le choix de Kamala Harris comme vice-présidente, une première, semblent se positionner aux antipodes de ce qu’était la présidence Trump. Un renouveau féministe et démocratique est-il donc à espérer ?
Le trumpisme dans sa phase 2 a déjà commencé et il va tout faire pour continuer d’attirer la lumière à lui et de nourrir le récit de la présidence selon lui illégitime de Joe Biden. (Marie-Cécile Naves)
C’est dans l’Amérique de Trump que naît #Metoo, que naît l’affaire Weinstein, et que naît la première opposition à Donald Trump dès janvier 2017 ; c’est les femmes, c’est les féministes ; c’est quatre millions de personnes dans la rue pour les Women’s March. (Marie-Cécile Naves)
Marie-Cécile Naves est docteure en science politique de l’université Paris-Dauphine et directrice de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) où elle supervise l’observatoire « Genre et géopolitique ». Après Trump, la revanche de l’homme blanc (Textuel, 2018) et Géopolitique des États-Unis (Eyrolles, 2018), elle publie La démocratie féministe chez Calmann Levy, qui s’intéresse à la situation des luttes féministe aujourd’hui face à des systèmes patriarcaux dominants.
On assisterait ainsi à la possibilité d’un renouveau féministe et démocratique, le féminisme ayant permis d’inciter à l’action et d‘influencer les pouvoirs publics. Depuis l’arrivée en 2017 du mouvement #MeToo, notamment, le domestique, l’intime, le sexuel deviennent des enjeux politiques. Le féminisme prendrait de l’ampleur, à la faveur d’un nouveau storytelling qui jouerait de la déconstruction des systèmes de croyance, le tout favorisé par un niveau inédit de circulation des influences intellectuelles et culturelles et de l »information.
Le fait de rejeter la science, de rejeter les études de genre, de rejeter les sciences humaines et sociales, de rejeter les études sur le climat, ça participe aussi de ce type de leadership très viriliste, très prédateur, qui a montré tout son échec dans la gestion de la Covid-19 en particulier. (Marie-Cécile Naves)
La lutte féministe se veut d’abord un combat. Elle doit porter la voix des femmes là où on ne les a pas encore entendues et rejoint en cela les luttes transversales, de l’affirmation des minorités à la protection de l’environnement.
Les études de genre, c’est une manière d’ouvrir le regard sur le réel. (… ) Quand on chausse les lunettes du genre, on élimine certains point aveugles dans l’analyse du réel et dans la manière dont on conduit des politiques publiques. (Marie-Cécile Naves)
En outre, même la crise du covid, phénomène planétaire, gagne à être analysée au prisme du genre. En touchant le monde entier, cette pandémie a souligné nos vulnérabilités collectives de même que nos capacités de résistance. En première ligne face à la maladie, les femmes, très présentés dans les métiers du care, ont montré la nécessité de ces derniers et la contradiction dans le fait qu’ils soient encore mis à la marge et dévalorisés.
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