Biden a besoin de plus de temps pour ses réformes

Interview pour la RTS, le 4.11.21

Le 4 novembre 2021, j’étais l’invitée de la Matinale de la Radio-Télévision Suisse (RTS) pour tirer un bilan de la première année de Joe Biden au pouvoir.

 

Un an après l’élection de Joe Biden à la Maison Blanche, les démocrates perdent des plumes dans des élections test comme mardi en Virginie. C’est un avertissement sévère pour le président américain, dont le bilan est toujours incomplet.

Dans son discours de vainqueur, Joe Biden avait promis d’être unificateur. « Je m’engage à être un président qui ne cherche pas à diviser mais à unifier », avait-il lancé lors de son discours de victoire le 7 novembre 2020.

Dix mois après son installation à la Maison Blanche, qu’en est-il? Invitée jeudi de La Matinale de la RTS, Marie-Cécile Naves, directrice de recherche à l’Institut français de relations internationales et stratégiques (IRIS), estime qu’il est encore un peu tôt pour dire si cet engagement est tenu.

« Le temps des réformes n’est pas le temps politique »

« Un an, c’est court (…) C’est vrai qu’il a misé sur sa longue expérience de sénateur, de vice-président d’Obama et sur ses talents de négociateur pour axer sa méthode de travail sur le compromis, notamment avec l’opposition républicaine. Il a de fortes ambitions de réformes (…) mais il a besoin de temps après des années de divisions amplifiées par son prédécesseur Donald Trump », explique encore Marie-Cécile Naves.

Or, « le temps des réformes n’est pas le temps politique, qui est de plus en plus court », rappelle cette spécialiste des Etats-Unis. « Ce qu’on voit, c’est qu’il traverse une assez mauvaise passe sur le plan intérieur. Il est confronté à l’aile gauche du parti démocrate qui veut que ça aille vite, qui veut frapper fort. Et lui est plutôt dans une recherche de compromis avec la droite. Tout ceci est une équation difficile à résoudre. »

Biden : un départ en fanfare sur le plan social

La présidence de Joe Biden avait pourtant commencé avec un vrai élan. En mars, le nouveau chef de l’Etat avait réussi à faire approuver des paiements directs aux ménages et des aides supplémentaires pour les chômeurs.

Les démocrates ont voté aussi en juillet une extension historique du filet social américain avec un crédit d’impôt pour les enfants, une sorte d’allocation familiale. Cela aurait permis de sortir trois millions d’enfants de la pauvreté, selon les estimations.

Mais Joe Biden a été élu avec un programme encore plus ambitieux: davantage de dépenses sociales ainsi que des investissements dans les infrastructures et dans le climat.

Lire aussi mon article : « Joe Biden contre les divisions de l’Amérique ».

Or ces différents paquets sont toujours bloqués devant le Congrès, malgré beaucoup d’énergie déployée par la Maison Blanche et par Joe Biden lui-même, qui s’implique personnellement.

Cette situation se ressent dans les sondages, qui donnent actuellement environ 42% d’opinions favorables au chef de l’Etat. Elle a eu aussi des conséquences mardi en Virginie, où le républicain Glenn Youngkin a remporté le poste de gouverneur.

« Cette défaite en Virginie est une très mauvaise nouvelle pour les démocrates et Joe Biden », relève Marie-Cécile Naves. « C’est sans doute lié aux réformes qui peinent à avancer, c’est frustrant pour les électeurs démocrates et les républicains en profitent. »

Mais Joe Biden n’a pas dit son dernier mot, ajoute cette directrice de recherche à l’IRIS. « S’il réussit à faire passer sa grande réforme sur les infrastructures dans les prochaines semaines, et c’est quand même bien parti, et d’autres réformes notamment en matière de relance qu’il a encore sous le coude, ça peut aussi être un signal pour les démocrates qu’ils doivent rester unis face à des républicains qui, eux, sont unis. »

Aller à la barre d’outils