Guerre en Ukraine : un nouvel ordre mondial ?

Invitée de "L'Info s'éclaire" sur France Info, le 15.03.22

Le 15 mars 2022, j’étais sur le plateau de « L’Info s’éclaire » sur France Info TV, pour débattre du sujet : « Guerre en Ukraine : un nouvel ordre mondial ? ». Une émission présentée par Axel de Tarlé.

Est-ce que La Chine va entrer en lice (c’était la grande inconnue jusqu’ici et on attendait que la Chine sorte du bois) ?

La Chine a besoin d’apparaître comme une interlocutrice de poids dans cette guerre. Elle ne pouvait pas rester en retrait (elle doit montrer qu’elle compte dans le jeu des grandes puissances).

Mais c’est très risqué pour elle de s’engager ouvertement auprès de la Russie, militairement et économiquement.

Moscou aurait demandé à Pékin de l’aide militaire et économique => Inquiétude des USA => dialogue pour lui mettre la pression.

Sur le plan militaire, la coopération entre Moscou et Pékin se renforce depuis plusieurs années. Les deux pays organisent des exercices conjoints, collaborent dans le développement d’armes nouvelles, sur leur infrastructure spatiale, la navigation par satellite, etc.

D’un côté, la crise en Ukraine peut profiter à la Chine s’il y a d’autres sanctions de l’Occident : en 2014, les sanctions en représailles à l’annexion russe de la Crimée ont doublé la part de la Chine dans le commerce extérieur de la Russie.

D’un autre côté, Pékin doit de protéger son commerce avec l’Europe, qui, actuellement, s’effectue à 95 % par la mer. La Chine craint un blocus commercial en cas de conflit avec Washington, qui a de nombreux alliés dans la région (Japon, Corée du Sud, Taïwan, Thaïlande, Australie). D’où sa volonté de développer un axe terrestre alternatif à travers l’Asie centrale : les nouvelles routes de la soie

De plus, Pékin accompagne ses investissements d’accords de coopération économique, politique et militaire dont Moscou estime qu’ils font concurrence à son propre projet d’intégration régionale des anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale et d’Europe.

La Chine perd des clients pour ses lignes ferroviaires.

Les entreprises chinoises risqueraient des sanctions occidentales, notamment américaines.

Stratégie des USA : mettre chaque pays devant ses responsabilités (Joe Biden : posture morale mais aussi « regardez vos intérêts »).

Le conseiller à la sécurité nationale des Etats-Unis, Jake Sullivan, rencontrait le 14 mars, à Rome, le directeur de la commission des affaires étrangères de Chine, le diplomate Yang Jiechi pour évoquer l’engagement éventuel de la Chine dans cette guerre.

L’administration Biden, qui croit plus que jamais à la confrontation des modèles, démocratique et autocratique.

On pensait la solidarité de l’OTAN mise à mal depuis le retrait des USA d’Afghanistan en août

OTAN avait diversifié ses objectifs : climat, etc.

Là, avec la guerre en Ukraine, il est ramené à sa raison d’être d’origine mais dans un monde qui a complètement changé !

L’Ukraine, l’un des plus grands exportateurs au monde de céréales (« grenier à blé »), les prix explosent et les premières pénuries apparaissent.

Au Liban, en Tunisie et en Égypte, très consommateurs de pain, c’est une question de sécurité alimentaire, de survie.

Pays déjà victimes de crises économiques et sociales majeures, donc difficile pour eux d’y voir clair dans leurs partenariats internationaux.

Ramadan en avril.

Les gouvernants de ces pays suscitent une forte défiance dans leur population. Risques d’émeutes.

Ex : le Liban achète les 2/3 de son blé à l’Ukraine.

Le pays ne peut plus compter sur ses réserves stratégiques en céréales depuis l’explosion mortelle du 4 août 2020 à Beyrouth qui a détruit les silos à grains près du port. Les trois quarts de la population vit déjà dans la pauvreté. La hausse des prix va aussi peser sur les faibles réserves en devises de la Banque du Liban, qui subventionnent les importations de blé.