Trump en 2024 ? « Ne pas l’enterrer trop vite »

Interview pour "Le Parisien", le 29.01.23

Le 29 janvier 2023, j’ai été interviewée par Marie Campistron pour « Le Parisien » sur la campagne de Trump, qui a déjà commencé, en vue des primaires républicaines et de la Présidentielle 2024.

Donald Trump lance sa campagne, malgré ses déboires : «On aurait tort de l’enterrer trop vite » Après avoir régné durant des années sur le parti Républicain, l’ancien chef de l’État, qui rêve de retrouver la Maison Blanche en 2024, semble avoir perdu de sa superbe.

Il n’est jamais trop tôt, comme semble le penser Donald Trump. Près de deux ans avant le scrutin présidentiel, le républicain a donné le top départ de sa campagne, en retrouvant samedi la ferveur des meetings en Caroline du Sud après le New Hampshire. Devant ses soutiens, le milliardaire a rejoué sa partition habituelle, répétant que l’élection de 2020 lui avait été volée.

« L’élection de 2024 est notre seule chance de sauver notre pays et nous avons besoin d’un leader qui est prêt à le faire dès le premier jour », a clamé l’ancien président. Le ton se voulait trumpien, tout comme les thèmes abordés – l’idéologie du genre qui minerait l’armée ou la théorie critique de la race qui serait imposée à l’école. « Trump ne changera pas. Il use des mêmes ficelles qu’avant, même si celles-ci séduisent un peu moins une partie des électeurs américains », observe Dominique Simonnet, essayiste et auteur des « Grands jours qui ont changé l’Amérique. »

De nombreux élus lui reprochent le mauvais score du parti lors des dernières élections de mi-mandat. Car si les républicains ont repris le contrôle de la Chambre des représentants, ils ont échoué à ravir le Sénat aux démocrates. La faute à l’ex-président, qui selon certains, se serait obstiné à présenter des candidats jugés trop extrêmes. Signe que son aura n’est plus la même, plusieurs voix en interne, à l’image de l’ancien président de la Chambre, Paul Ryan ou du sénateur Mitch McConnell, n’hésitent plus à critiquer l’influence du milliardaire sur le parti.

Dans la même veine, le chef des républicains à la chambre, Kevin McCarthy, a tout simplement refusé de répondre aux journalistes qui lui demandaient s’il soutenait la candidature de Donald Trump pour 2024… lui qui était pourtant allé jusqu’à Mar-a-Lago au lendemain du 6 janvier pour réhabiliter l’ancien président. Des doutes semblent poindre également au sein de son cercle familial. Sa fille Ivanka Trump a déjà annoncé qu’elle ne s’impliquerait pas dans la campagne de son père. Trump voit encore certains de ses grands donateurs – Le PDG du groupe Blackstone et Ronald Lauder, héritier du groupe Esthée Lauder – le lâcher publiquement, au profit de Ron DeSantis, gouverneur de Floride et étoile montante du parti.

Des désaveux dont le tribun se serait bien passé alors qu’un éventail d’enquêtes judiciaires le menace toujours. «Ilreste soutenu par une large frange de son parti» La commission parlementaire qui avait enquêté sur sa responsabilité dans l’assaut du Capitole a recommandé qu’il soit poursuivi pénalement. Une juge en Géorgie a aussi promis une décision « imminente » après les pressions politiques qu’il a pu exercer dans cet État lors du scrutin présidentiel.

Mais si les difficultés s’accumulent pour celui qui tente de « jouer la montre », sous-estimer son poids serait une erreur, avance Marie-Cécile Naves, directrice de recherche à l’Institut Iris. « Le récit de celui qui se relève toujours est au cœur de la marque Trump. Il reste soutenu par une large frange de son parti car il représente un énorme réservoir de voix : 74 millions en 2020, 11 millions de plus qu’en 2016. On aurait tort de l’enterrer trop vite. Ce culte de la personnalité fait qu’il pourrait remporter la primaire, en bénéficiant d’un éparpillement des voix chez ses adversaires. » Le milliardaire, dont la chute a été mille fois annoncée, pourra encore profiter de la réactivation prochaine de ses comptes Facebook et Instagram, retrouvant un mégaphone de taille. « Cela lui permettra de s’adresser à ses soutiens mais aussi à une grande partie de l’électorat complotiste. Il n’y a pas de raison que ce qui a fonctionné en 2016 ne fonctionne pas aujourd’hui », remarque la chercheuse.