Le « djendeur », ou la nouvelle figure de l’ogre

Le rejet, par certains, du concept de genre – qui cache, au fond, un refus de l’égalité entre les hommes et les femmes, entre les petites filles et les petits garçons – est intéressant sur au moins un point : la mythification (qui est aussi une mystification, du reste) de ce concept, avec l’invention d’une « théorie du genre » qui n’existe pas et qui est confondue, sciemment ou pas, avec les « études de genre » en sciences humaines et sociales.

Dans leur croisade (sic), les ultra-conservateurs (qui n’ont rien de « néo », au passage), soucieux de préserver coûte que coûte le patriarcat (voire d’en restaurer une forme plus archaïque), privilégient le mot anglophone de « gender » pour en signifier l’étrangeté, l’exotisme (il vient des Etats-Unis), en un mot la dangerosité. Car il s’agirait, horreur suprême, de « dire aux petits garçons qu’ils peuvent être des petites filles » (lu à maintes reprises sur Internet)… – et inversement, mais c’est moins grave dans ce sens-là. La phrase, qui témoigne d’une confusion grossière entre identité sexuelle, identité sexuée et genre, est suffisamment ridicule, et dépourvue de sens, pour qu’on ne s’y attarde pas davantage.

Le « djendeur » est alors comme l’ogre qui mange les enfants, ou le diable qui les emporte, tel le Erlkönig (Roi des Aulnes) de Goethe qui, au départ, séduit le gamin par des promesses fantastiques (et un peu érotiques aussi), avant de le menacer de lui faire du mal s’il ne cède pas.

Nier l’existence du « genre » en le rangeant dans la catégorie des fantasmes dangereux n’est qu’une manière de démontrer qu’il existe. Contrairement au diable.