Trump, un Président sous influence ?

3376-donald-trump_5563961Des généraux, des milliardaires, des Républicains « ultras » : le choix des futurs secrétaires (ministres), hauts responsables de l’administration et membres du cabinet de Donald Trump laisse un sentiment mitigé.

Premièrement, où est la rupture avec l’ « establishment » tant promise pendant la campagne ? Où est passée la phrase emblématique du candidat Trump, à la veille du scrutin du 8 novembre, quant au fait d’ « assécher le marigot de Washington » ?

Deuxièmement, ces choix sont-ils réellement les siens ? Le cas de James Mattis, annoncé comme futur secrétaire à la Défense (si tant est que le Congrès accepte de lui accorder une dérogation, vu qu’il a quitté l’armée il y a moins de 7 ans), est tout à fait emblématique. Général respecté dans le camp républicain comme chez les responsables militaires, c’est avant tout un pragmatique, un défenseur de l’équilibre des forces sur le terrain. Ce spécialiste du Moyen-Orient s’oppose à la torture, défend le rôle de l’OTAN et, s’il prône une vigilance sur l’Iran, il souhaite la création d’un Etat palestinien pour aller vers un règlement du conflit avec Israël.

Parfaitement novice en matière militaire et diplomatique, Trump est tenu de faire confiance aux (nombreux) élus et spécialistes qu’il consulte à tour de bras depuis un mois. Sera-t-il une marionnette dans les mains d’une administration et d’un sérail républicains qui, eux, connaissent bien la musique et poussent leur pions ?

Les improvisations de Trump ne peuvent qu’inciter responsables et réseaux politiques, sinon à le maîtriser ou lui faire entendre raison – la campagne a montré que c’était hasardeux -, en tout cas à le contourner, à l’influencer, voire à le manipuler. On peut s’y attendre en particulier en politique étrangère. Faisant fi des usages et des rapports de forces en place, Trump a en effet accepté, le 2 décembre dernier, un coup de téléphone de la présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen. Cet échange direct, le premier depuis la rupture des relations diplomatiques en 1979 entre les deux pays, a été vu par la Chine comme une reconnaissance implicite de l’existence de Taïwan comme un Etat à part entière, alors que la politique américaine est de considérer une « Chine unique » – ce que n’a pas manqué de rappeler, du reste, l’actuel Conseil de sécurité nationale.

Guidé par des motivations mercantiles et son habitus de businessman, Trump considère que les relations géopolitiques peuvent se calquer directement sur les modalités de la diplomatie économique (« faire des deals », comme il l’a expliqué lui-même à plusieurs reprises). Ou alors – mais cela n’est pas contradictoire -, tel un enfant gâté dans un gigantesque magasin de jouets, il a envie de s’amuser. Cela risque de ne pas durer.

(Crédit photo : Reuters/ Brian Snyder)