Guerre en Ukraine : le sport en première ligne

Article publié dans "Légende le mag" de mai 2022

La guerre en Ukraine constitue un tournant incontestable : tant par leur ampleur que par leur rapidité, les réactions du champ sportif aux hostilités déclenchées par la Russie de Vladimir Poutine sont sans précédent. Désormais, le sport international ne peut plus faire comme s’il n’était traversé de politique et de géopolitique. Article publié dans le numéro 8 de mai 2022 du magazine trimestriel « Légende » (en kiosques et librairies).

Ces derniers mois, les mobilisations internationales de la Women’s Tennis Association (WTA) et de nombreuses sportives et nombreux sportifs en faveur de la joueuse de tennis chinoise Peng Shuai avaient déjà largement fissuré le mur de la neutralité. En novembre 2021, juste après avoir accusé de viol un ancien dirigeant chinois, Peng Shuai avait mystérieusement disparu, suscitant un immense émoi dans le monde du sport à l’échelle mondiale, avec notamment le hashtag, largement relayé : #WhereIsPengShuai (« Où est Peng Shuai ? »). Miraculeusement et brièvement réapparue pour un entretien très cadré lors des Jeux d’hiver de Pékin en février 2022, dans lequel elle est revenue sur ses déclarations de novembre, elle semble aujourd’hui selon toute vraisemblance menacée, ainsi que sa famille, par les autorités de son pays. Que la Chine ait sous-estimé le soutien à la joueuse et que le Comité international Olympique (CIO) ait timidement réagi n’ont fait que braquer un peu plus les projecteurs sur cette impossibilité, pour le sport mondial, de se prétendre coupé du monde (et pour ne pas dire, parfois, du droit commun).

C’est aujourd’hui le conflit russo-ukrainien qui est mobilisateur. Plusieurs fédérations et de nombreux champions et championnes de nationalité ukrainienne se sont engagés publiquement contre cette guerre, sur les réseaux sociaux, en interviews, voire sur les terrains – ce qui jusqu’ici était exceptionnel. Le 11 mars 2022, à Cardiff, en ouverture du match Galles-France du tournoi masculin de rugby des Six nations, on diffusait « Give Peace a Chance », la chanson de John Lennon, dans les hauts parleurs. Les tribunes des stades de football se sont illuminées en jaune et bleu dans plusieurs grandes villes d’Europe. Partout, des collectes se sont organisées pour les réfugiés ukrainiens. En Finlande, lors de l’étape de Coupe du monde de biathlon, skieuses et skieurs ont décoré leurs dossards, carabines ou combinaisons avec des drapeaux ukrainiens. Le maire de Kiev lui-même, Vitali Klitschko, ancien champion de boxe, a appelé les Ukrainiens à « se battre jusqu’au bout ».

Le tennis était en première ligne. Un jeune retraité ukrainien des courts de tennis, Sergiy Stakhovsky, a déclaré rejoindre l’armée de son pays en tant que réserviste. Il a été soutenu publiquement par Novak Djokovic. Alexandr Dolgopolov et Andreï Medvedev, deux autres anciens tennismen professionnels, ont emboîté le pas de Stakhovsky. Les sœurs Dayana et Ivanna Yastremska, qui ont quitté Odessa suite aux bombardements russes et se sont rendues en France pour participer à l’Open 6e Sens, à Lyon, ont exposé, sur le court, le drapeau ukrainien. « Je me suis battue pour mon pays », a déclaré la première après sa finale, perdue, ajoutant qu’elle donnerait son prize money de 14 500 euros à une fondation humanitaire en Ukraine. Lors du tournoi d’Indian Wells, en Californie, où certaines participantes, dont la Polonaise Iga Swiatek, ont disputé leurs matches en portant un ruban jaune et bleu, la joueuse ukrainienne Marta Kostyuk a regretté de ne pas avoir été soutenue ou réconfortée par les compétitrices russes.

Elina Svitolina, également ukrainienne, quinzième au classement mondial, a annoncé qu’elle verserait toutes ses primes de match gagnées au tournoi de Monterrey, au Mexique, à l’armée de son pays. Vêtue d’une jupe bleue et d’un tee-shirt jaune, elle a affirmé, comme Dayana Yastremska à Lyon, se sentir « en mission ». Svitolina a également déclaré qu’elle ne jouerait plus contre des adversaires russes ou biélorusses tant que la WTA, l’Association of Tennis Professionals (ATP), et la Fédération internationale de tennis (IFT) continueraient d’accepter la participation des ressortissantes et ressortissants russes ou biélorusses, à moins qu’ils et elles ne concourent sous une bannière neutre et non en affichant les « symboles, couleurs, drapeaux ou hymnes de leur nation » (…)

La suite est à lire dans le magazine (en vente ici).